«C’est dans Classroom!»

Google Classroom est un outil convivial et polyvalent qui permet plusieurs usages techno-réfléchis. Si bien que dans le virage au numérique, plusieurs enseignants choisissent Google Classroom comme solution infonuagique. On peut presque dire que Google Classroom est devenu un incontournable pour plusieurs enseignants, et même pour certaines directions d’école. Il est donc de plus en plus fréquent d’entendre l’expression «C’est dans Classroom!». Certains l’affirment même avec une certaine fierté. Après tout, nous (le grand monde de l’éducation) avons tellement fait de progrès au niveau de l’utilisation des technologies depuis quelques années. Je me souviens encore du stress qu’a occasionné pour plusieurs le passage de Word à Google Docs. Sérieusement. Je peux donc très bien comprendre la fierté et le sentiment de satisfaction que peuvent ressentir les gens qui utilisent maintenant Google Classroom. C’est le signe que l’étape du piton est passée pour plusieurs et que nous avons développé une certaine compétence avec la technologie et la suite GAFE (Google Apps For Education).

Or dans notre quête de transformer l’expérience d’apprentissage des élèves, dans notre souci de garder la barre haute, comme le dit mon collègue @jprofnb, je me demande ce qu’on entend par «C’est dans Classroom». À une certaine époque, le tableau vert venait révolutionner l’enseignement. Nous savons aujourd’hui que c’est ce qu’un enseignant fait avec le tableau vert qui est transformationnel pour les élèves. L’effet enseignant. C’est la même chose avec Google Classroom. Il va sans dire que l’infonuagique ajoute une couche de complexité dans la démarche d’enseignement et d’apprentissage. Quand un enseignant dit : «C’est dans Classroom», c’est un engagement important qu’il prend avec ses élèves et avec la communauté. Surtout si on élimine des outils traditionnels comme l’agenda imprimé, qui servait à écrire les devoirs mais aussi à communiquer avec les parents. On donne accès ou on ne donne pas accès. Il n’y a pas de demi-mesure. Il faut donc être proactif et constant.

«Quand un enseignant dit : «C’est dans Classroom», c’est un engagement important qu’il prend avec ses élèves et avec la communauté. Surtout si on élimine des outils traditionnels comme l’agenda imprimé, qui servait à écrire les devoirs mais aussi à communiquer avec les parents.» @bourmu

Oui, nous (le système) avons fait de grands pas dans le virage au numérique. C’est vraiment fantastique quand on y pense. Or en discutant avec des enseignants et des directions, dont plusieurs sont aussi des parents, je fais certains constats qui peuvent éclairer nos prochaines étapes. Voici donc deux aspects à considérer pour maximiser l’effet enseignant dans nos efforts d’intégrer l’infonuagique (Google Classroom dans ce billet) dans la démarche d’enseignement et d’apprentissage. Vous remarquerez que certaines choses n’ont rien à voir avec l’outil.

1. Accompagner les élèves dans l’infonuagique

L’accès à l’information et aux personnes. N’est-ce pas l’avantage ultime d’internet et des outils infonuagiques? Avec Google Classroom, on donne accès aux dates d’échéance, aux travaux, aux notes de cours, aux rétroactions, aux sondages, aux directives, aux conversations… Vous l’aurez deviné. Vous le cherchez? C’est dans Classroom! Et c’est fantastique.

  • Comment ça marche? Les enseignants qui ont du succès avec Classroom font un enseignement explicite de l’outil à leurs élèves. On pense souvent que les jeunes «sont technos». C’est vrai. Mais pas tous et pas avec tous les outils. L’étape des clics est importante. Il faut s’assurer que les élèves savent comment utiliser Classroom et tout ce qui l’entoure.
  • À quoi ça sert? Il faut aussi discuter avec les élèves de l’utilisation que l’on compte faire de cet outil. Après tout, les élèves se rendent à l’école parce qu’il y a un grand avantage de se retrouver tous ensemble physiquement au même endroit. L’infonuagique nous permet, entre autres, de conserver des informations qui nous seront utiles et accessibles après les heures de classe. C’est ce qui nous permet d’ailleurs de parler d’apprenants à vie, d’apprentissage continu. Voici trois questions intéressantes à aborder avec vos élèves :
    1. Qu’est-ce qui doit être écrit au tableau ou affiché sur les murs en classe?
    1. Qu’est-ce qui doit être dans Classroom?
    1. Qu’est-ce qui doit se retrouver aux deux endroits (p. ex., les échéances)?
  • Qui est responsable? Ce n’est pas parce qu’on met quelque chose dans Classroom que tous les élèves vont aller le voir. Soyons honnêtes. Google Classroom ne fait pas de la magie, mais presque. Même avec les notifications et les courriels automatiques, les enseignants qui ont du succès avec Google Classroom ne remplacent pas leurs conversations avec les élèves par des courriels et des notifications. Non. Ils communiquent activement avec leurs élèves et ils explicitent la démarche d’enseignement et d’apprentissage, qui comprend ce qui se fait physiquement en classe (papier, tableau, murs, conversations), ce qui se trouve déjà dans Classroom et ce qui devra se retrouver dans Classroom à la fin d’un cours. Et ça comprend la mise à jour quotidienne de l’agenda du cours.
  • Qui se rappelle du modèle SAMR? Plusieurs commencent par ajouter des notes de cours ou des copies de leur manuel en pdf dans Classroom. C’est super. C’est un début et je ne critique pas cette pratique, loin de là. C’est ce qui permet de maîtriser le piton, le «comment ça marche» de Google Classroom. C’est un début. On amène la démarche traditionnelle en ligne. Lire la page 27 (pdf) et répondre aux questions 1 à 6. À remettre jeudi dans Classroom. On corrige vendredi en personne. Au début, on apprend à utiliser l’outil. Mais pour transformer l’expérience d’apprentissage des élèves, il faut engager les élèves différemment avec le contenu. Je développe cette idée dans ce billet.

 2. Développer les habiletés d’apprentissage et les habitudes de travail des élèves dans le contexte du numérique

En début d’année, il n’est pas rare de voir le personnel remettre les fournitures scolaires à leurs élèves. Crayons, règle, reliures à anneaux de différentes couleurs, intercalaires, etc. Dans plusieurs écoles, on harmonise la couleur de la reliure pour les différentes matières. Français : jaune, Mathématiques : bleu, Géographie : vert… On précise même le nombre et le nom des intercalaires pour chacun des cours. On organise nos élèves! C’est plus facile pour eux et pour nous. Fait-on la même chose dans Classroom? Dans l’environnement Google des élèves? En Ontario, tel que stipulé dans la politique Faire croître le succès (voir p. 15), nous avons le mandat de développer les (HH) habiletés d’apprentissage et habitudes de travail des élèves. Les voici :

  • Utilisation du français oral
  • Sens de l’organisation
  • Sens de l’initiative
  • Esprit de collaboration
  • Autonomie
  • Fiabilité
  • Autorégulation

Je dis bien «développer». C’est une chose d’évaluer (juge) les HH. C’en est une autre de les enseigner (guide) et de les développer chez nos élèves. J’aborde la notion de guide et de juge dans ce billet. Les HH se retrouvent sur la 1re page du bulletin scolaire de l’Ontario. À l’élémentaire, les HH sont évaluées au bulletin de progrès (novembre), à la 1re étape (février) et à la 2e étape (juin). Au secondaire, on les évalue à la mi-semestre et à la fin du semestre. À chaque bulletin, les élèves obtiennent E (excellent), T (très bien), S (satisfaisant) ou N (amélioration nécessaire) pour chacune des HH. C’est important, les HH. Souvent, c’est ce qui explique le rendement scolaire de nos élèves.

Capture d’écran 2016-03-30 à 13.36.35Alors comment peut-on développer les HH de nos élèves dans le numérique? C’est la question de l’heure dans le terrain présentement. Ce qui fait en sorte que plusieurs enseignants ont commencé à enseigner explicitement à leurs élèves comment gérer leur Drive (dossiers, documents), leur agenda (souvent plusieurs agendas différents), leurs courriels etc. Combien d’élèves dans nos classes ont des centaines de courriels non-lus? Combien ne savent pas comment bien communiquer par courriel?

Quand on affirme : «C’est dans Classroom», ça signifie que nous nous engageons à accompagner les élèves dans le développement de leurs HH dans le numérique également. La vraie vie nous demande désormais de savoir bien gérer notre emploi du numérique à tous les instants. Vraiment. Pensez-y. Notre quotidien est rempli de ce va-et-vient entre le physique et le numérique (Je n’utilise pas Réel et Virtuel parce que le virtuel est réel dans bien des cas selon moi.). L’autorégulation dans le numérique, c’est de permettre aux élèves de demeurer maître de l’outil. Et on ne parle pas encore du rôle de leur appareil mobile dans tout ça. Ce sera pour un autre billet!

«Quand on affirme : «C’est dans Classroom», ça signifie que nous nous engageons à accompagner les élèves dans le développement de leurs HH dans le numérique également.» @bourmu

Surestimons-nous nos élèves?

Enfin, faire le choix de dire «C’est dans Classroom», c’est faire le choix de gérer le numérique au quotidien. Pour les élèves et pour la communauté. Nous ne pouvons pas prendre pour acquis que les élèves savent quoi faire et comment faire. Nous devons plus que jamais être explicites avec eux et les accompagner. Quand on intègre la technologie en salle de classe, on l’intègre aussi dans notre pratique. Ça fait boule de neige et c’est alors le début de la transformation de l’expérience d’apprentissage de l’élève. Ne prenons rien pour acquis. Mon expérience me dit qu’on surestime les compétences technologiques des élèves et on sous-estime les nôtres. Ça explique peut-être pourquoi certains hésitent à être aussi explicites avec la technologie qu’il ne l’étaient avec les reliures à anneaux et les intercalaires, par exemple. Les élèves ont besoin de nous!

«C’est dans Classroom!», ok.

Et l’effet enseignant, «C’est dans l’prof!».

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20 Fév, 2017

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Commentaires

2 Commentaires

  1. Anonyme

    Bravo Marius, Classroom n’est qu’un système de gestion et non d’apprentissage. Aussi, tant et aussi longtemps qu’un outil (Chromebook, etc.) n’est pas fourni à l’élève par le système scolaire, le développement des HH à l’ère numérique doit passer en partie par le téléphone cellulaire.

    Réponse
    • Marius

      Bien d’accord avec toi, Jacques. Merci de ton commentaire 🙂

      Réponse

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