Le leadership et le service au volant chez Tim Horton’s!

Je suis passé me prendre un café chez Tim Horton’s cette semaine. À Alfred, en fait. Un nouveau Tim Horton’s vient d’ouvrir ses portes. En passant au service au volant, j’ai observé un superviseur en train d’appuyer une nouvelle employée. Et je me suis mis à faire des liens avec le leadership. Sérieux. Suivez-moi. Je pense que ça a du bon sens 😉

Croire que les personnes ont de la valeur

 

Quand les leaders d’une organisation se rendent compte que les personnes de leur organisation sont leur principal atout, tout devient possible. Tout devient possible parce qu’on se met à investir dans le développement des personnes. C’est normal, on reconnaît leur importance. Et ce n’est pas long qu’un certain momentum s’installe au sein de l’organisation. L’organisation se met à «rouler», comme on dit. Mais comment peut-on maximiser l’investissement de temps, d’argent, d’effort, dans le développement des personnes et du leadership d’une entreprise? Et s’il existait un processus dont pouvait s’inspirer l’éducation?

L’exemple de Tim Horton’s

Pour pouvoir former une nouvelle employée, j’imagine que le superviseur a d’abord dû apprendre comment doit se faire le travail. La partie technique. Où cliquer. Comment travailler en équipe, les processus etc. Il y a aussi l’approche du service à la clientèle. Comment accueille-t-on le client? En personne et au service au volant. Ce que je veux dire c’est que le superviseur doit ÊTRE/DEVENIR, d’abord, un employé modèle. Ou du moins être capable de modeler ce qui est recherché des employés. L’idée derrière le développement de personnes, c’est de reproduire des leaders. On peut enseigner ce qu’on sait, mais on reproduit qui on est. Ensuite, le superviseur a probablement invité la nouvelle employée à l’observer, à lui poser des questions, à écouter etc. La prochaine étape, c’est ce que j’ai observé quand je suis passé au service au volant. La nouvelle employée faisait la tâche, mais elle était appuyée par le superviseur qui était là pour répondre à ses questions, pour lui donner des conseils, pour la rassurer et pour assurer un certain contrôle de la qualité. Elle a bien fait ça et mon café était bon, en passant. Cette étape de formation d’une nouvelle employée prendra un certain temps mais j’anticipe qu’à mon prochain passage chez Tim Horton’s, cette nouvelle employée sera autonome. Le superviseur sera moins près d’elle. Et peut-être qu’un jour, cette nouvelle employée sera celle qui formera les nouvelles employées. C’est le cycle. Démarrer, autonomiser, pérenniser.Vous me suivez?

Un processus pour développer des personnes en éducation

L’éducation, c’est une entreprise de développement de personnes. Pensez-y. Mais le leadership est un concept qui peut être abstrait. Comment on fait ça, reproduire des leaders? On place un bon leader dans un poste et on espère qu’il irradie du leadership, qu’il devienne une borne d’accès au leadership? Si on espère bâtir une culture de leadership, il faut davantage miser sur un processus intentionnel de reproduction. Si l’éducation s’inspire du modèle de Tim Horton’s, le processus pour développer des leaders à tous les niveaux du système aurait 5 étapes à partir du moment où un leader EST.

1- Je le fais.

De nos jours, les choses avancent tellement vite que les gens veulent apprendre et être dirigés par des gens qui leur servent de modèles. Si on veut développer des personnes dans notre salle de classe, dans notre secteur, dans notre école, dans notre conseil, il faut d’abord croître intentionnellement soi-même et être en mesure de modeler, à notre niveau, les pratiques et les comportements qu’on recherche des personnes dans notre système. C’est une approche qui part d’une mentalité, d’une philosophie de leadership bien simple. Être au service de l’autre, ajouter de la valeur à l’autre. Pour ajouter de la valeur à l’autre, il faut croire que l’autre a de la valeur. Et pour pouvoir ajouter de la valeur à l’autre, il faut avoir quelque chose à offrir. Il faut donc continuellement être en train d’ajouter de la valeur à qui on est. On ne peut pas donner ce qu’on n’a pas. Bref, ajouter de la valeur à soi-même pour pouvoir ajouter de la valeur aux autres, parce qu’on croit qu’ils ont de la valeur. (pas facile à verbaliser, cette phrase) On enseigne ce qu’on sait, mais on reproduit qui on est. Étape 1 : ÊTRE/DEVENIR.

2- Je le fais et tu m’observes.

À l’étape 2, on invite un futur leader à nous observer dans le feu de l’action, on fait de l’enseignement explicite, on rend notre pensée visible, on explique le pourquoi et le comment de tout ce qu’on fait. La personne qui observe peut nous poser des questions, faire des commentaires… Pour établir sa crédibilité, on s’entend qu’il faut ÊTRE, ici. Inutile d’essayer d’avoir l’air… Avant d’avoir de la visite, on se prépare.

3- Tu le fais et je t’observe.

À l’étape 3, on passe le flambeau au futur leader. Savoir comment faire n’est pas suffisant. Il faut donner l’occasion à l’autre de développer ses compétences, de goûter au terrain, de vivre en contexte ce qu’il a appris et observé. Ici, le rôle du leader est de ne pas prendre trop de place, de laisser l’autre faire son chemin. Le leader pose des questions, répond aux questions, offre du soutien et de la rétroaction constructive en fonction des progrès de la personne qu’il développe. Cette étape prend du temps. Et il faut prendre le temps. On ne fait pas pousser un carotte en tirant sur la queue. Processus.

4- Tu le fais.

Après un certain temps, la personne devient autonome. Elle peut s’acquitter de ses tâches, de ses défis, de son travail, prendre des décisions, faire des apprentissages etc. Le leader est là au besoin. Le nouveau leader donne des résultats à son entreprise, il est devenu, lui aussi, une référence dans son entreprise. Mais ça ne finit pas ici. On ne maîtrise pas un rôle, une compétence, un contexte tant qu’on ne peut pas l’enseigner à quelqu’un d’autre… Et c’est là la clé dans une culture axée sur le leadership.

5- Tu le fais et quelqu’un d’autre t’observe.

À l’étape 5, le nouveau leader accueille à son tour un futur leader. Et il l’accompagne, à son tour, dans son développement. On n’a jamais formé complètement un leader tant qu’il ne peut pas se reproduire. C’est l’effet multiplicateur systématique qui fait qu’une entreprise devient de plus en plus performante. Ça prend du temps, de l’énergie, de l’effort, de la patience, une vision.

Appliquer ce processus en salle de classe

Appliquons ce processus à la salle de classe, juste pour voir. Disons qu’on veut développer des élèves-leaders / citoyens (numériques) responsables. Les 5 étapes auraient l’air de ça.

  1. Il faudrait d’abord ÊTRE (l’enseignant) un assez bon citoyen numérique, avant d’essayer de développer les élèves. On ne donne pas des cours de nage si on ne sait pas nager. Même si on a un super bon manuel!
  2. Quand on a développé un certain niveau de compétence, on fait l’enseignement explicite de ce qu’est la citoyenneté numérique et on fait le modelage des comportements souhaités. Ici, on est en contexte. Comme chez Tim Horton’s. On rend notre pensée visible, on répond aux questions, on établit les critères/paramètres à respecter. Petits pas. Ouverture graduelle sur le monde, en fonction du groupe d’âge des élèves. Cette étape n’a pas à être bien longue. Les élèves savent déjà les clics. C’est le processus de réflexion et la lecture du contexte qui peut leur échapper.
  3. La troisième étape est la plus importante et la plus longue, du point de vue du développement des élèves. On les place en contexte et ils doivent développer leurs compétences. Selon le groupe d’âge, votre relation avec les élèves, leur degré d’autonomie etc., vous déterminez le degré d’ouverture sur le monde approprié pour les accompagner dans le développement de leur citoyenneté numérique. Concrètement, on parle de collaboration dans un document Google, d’un échange sur Twitter, d’un blogue, d’un portfolio numérique, d’une campagne sur Facebook… Les possibilités sont illimitées. Ici, les élèves se développent en contexte.
  4. À l’étape 4, les élèves ont développé un certain niveau d’autonomie dans le contexte numérique que vous avez déterminé/délimité avec eux.
  5. À l’étape 5, les élèves sont invités à accompagner d’autres élèves. Possiblement plus jeunes. Ou même des adultes. L’idée ici, c’est de leur permettre de jouer le rôle d’enseignant. Mais un rôle d’enseignant qui leur permet de transmettre les compétences et les connaissances acquises aux étapes 2, 3 et 4.

Le hic avec ce processus, c’est qu’il commence quand on (l’enseignant dans ce cas-ci) a déjà atteint un niveau élevé de compétence (en citoyenneté numérique dans cet exemple). C’est un peu comme de commencer au niveau 4 des 5 niveaux de leadership de John Maxwell. Comment s’y rendre si personne ne peut nous appuyer ou nous former en personne? Observons le système de badges du CADRE 21.

CADRE 21 et les badges : un processus d’autoformation pour devenir

Cadre 21 offre présentement plus de 38 badges dans un système d’autoformation. C’est un concept très intéressant. J’ai eu la chance d’assister à une présentation de ce système cette semaine. Merci à Jacques Cool, à Normand Brodeur et à mes collègues du CSDCEO. J’attire votre attention aux 4 niveaux de badges du Cadre 21. Remarquez le choix des mots.

Capture d’écran 2017-06-09 à 13.45.51.png

On remarque que le leadership apparaît au niveau Innovateur. Ce serait là, le point d’entrée (étape 1) du processus de reproduction de leaders, de développement de personnes (5 étapes) que je vous propose dans le présent billet. Pour arriver à ÊTRE une référence dans une compétence ou un domaine quelconque, il faut commencer quelque part. Souvent, les gens pensent qu’on l’a ou on ne l’a pas. Devenir, c’est un processus. Les 4 niveaux de badges du CADRE 21, c’est en fait le processus normal d’acquisition de compétences ou du développement d’une personne. On commence d’abord par être curieux, par être disposé à apprendre quelque chose de nouveau. On explore. Ensuite on se développe, on expérimente, on intègre et, finalement, on innove. Ça prend du temps, devenir compétent.

EAVI : Le modèle SAMR des compétences?

Si le modèle SAMR nous a éclairés pour l’intégration de la technologie au service de l’apprentissage, je crois que le modèle EAVI pourrait nous éclairer dans l’enseignement, le monitorage de la progression et l’évaluation des compétences globales. Je lance ça comme ça. Le point d’entrée serait la mentalité de croissance, une disposition à apprendre. On parle de l’importance d’apprendre à apprendre. Dans le modèle EAVI, le E pourrait désigner Explorateur (apprenant disposé à apprendre) A V I (à vie). Il ne resterait qu’à nourrir la matrice EAVI pour voir comment pourrait se manifester l’acquisition ou le développement graduel des 6 compétences globales. Et, pourquoi pas, des badges pour s’afficher et se reconnaître!

Je vous rappelle que tout ça a commencé par un café chez Tim Horton’s. C’est fou les liens qu’on peut faire en passant chez Tim Horton’s et en discutant avec des collègues!

Je vous laisse avec 2 questions :

  1. Que pensez-vous du processus intentionnel (leadership) de développement de personnes (compétences) en 5 étapes? Ça peut fonctionner à tous les niveaux du système?
  2. Que pensez-vous de l’idée du modèle EAVI (Explorateur à vie) pour soutenir l’acquisition et le développement des compétences globales? Ça se tient?

Merci de vos commentaires!

 

10 Juin, 2017

Recevoir le blog par courriel

Merci pour votre inscription!

Commentaires

0 commentaires

Laisser un commentaire

Vous pourriez aimer

Leader : un appel à l’Être

Il y a beaucoup de bruit en éducation présentement. C’est parce qu’il y a beaucoup de défis. Au fil de mes...